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Beskrivelse
A la fois biographique et r flexive, cette monographie cherche r pondre un certain nombre de questions que soul vent le temp rament artistique et l'oeuvre exceptionnelle de Picasso surgis une poque non moins exceptionnelle. Picasso y est consid r en fonction de sa situation en son temps, au sens le plus large du mot, bien au-del des amiti s et des rivalit s strictement artistiques du milieu parisien et fran ais. Lui-m me par nombre de ses prises de position n'a-t-il pas affirm qu'il refusait de s'enfermer dans l'atelier et se r servait le droit d'intervenir dans les affaires du monde - d'y r agir et de leur r pondre ? C'est donc d'un Picasso r solument moderne parce que constamment et consciemment confront la modernit du monde qu'il s'agira de montrer: comment il laisse cette modernit p n trer dans ses travaux - mat riaux, images, techniques, inventions - et comment, en r action contre elle, il donne forme picturale ou sculpturale des arch types - des passions, des pulsions- dont, ses yeux en tout cas, la permanence atteste de l'intemporalit . Mouvement d'acceptation mouvement de refus: cette confrontation sans tr ve est, peut- tre, l'explication la plus satisfaisante que l'on puisse avancer de la volont de changement qui l'a anim au point de laisser l'oeuvre la plus polymorphe et la plus diverse de toute l'histoire de l'art. La r flexion se d veloppe ainsi en quatre mouvements. Le premier, qui s'ach ve peu avant que la Premi re Guerre Mondiale r v le la face terrible de la modernit scientifique et industrielle, est celui de l'ouverture toutes les modernit s. La travers e rapide des styles artistiques issus de la Renaissance - de ce qui a t l'art et son histoire jusqu'alors- conduit au moment critique par excellence: le primitivisme, qui peut tre pens comme la n gation r solue du moderne, et le cubisme, qui appara t l'inverse comme son acceptation et la fa on la plus radicale d'en tirer les cons quences plastiques. Le deuxi me, dont la conjonction du cubisme et d'un dessin quasi ingresque Avignon au d but de l' t 14 marque le commencement et qui dure jusqu'au d but des ann es 30, se caract rise l' vidence par la simultan it de pratiques et de styles si distincts qu'on peut les penser incompatibles, le post-cubisme qui ne dispara t pas, le n o-classicisme et l'invention d'une autre peinture encore. Cette p riode pourrait tre dite celle de l'artiste ma tre du monde , puisque capable de donner chaque sujet et chaque sentiment sa forme visuelle la plus juste - ma trise qui est aussi celle d'une vedette la prosp rit visible, soup onnable d'embourgeoisement; celle, en somme, d'un Picasso assur de ses moyens et de sa logique, de sa position et de sa gloire. La troisi me se place sous le signe des monstres, quand la ma trise maintenue pendant une quinzaine d'ann es clate sous la pression d' v nements publics et priv s qui sont tous de l'ordre du d sordre et du drame. Il n'y aura pas d'ordre, il n'aura que des trag dies. Il n'y a donc plus lieu de maintenir l' quilibre compl mentaire entre plusieurs styles, mais de se pr cipiter dans l'exp rimentation, du c t des terreurs et des crimes avec pour principaux compagnons les surr alistes et surtout Andr Breton. A moins que l'on ne veuille reconna tre dans l'oeuvre picassienne des ann es 30 et 40 quelque chose comme l' quivalent de l'analyse freudienne - celle du malaise dans la civilisation qui tourne la catastrophe. Ces v rit s montr es, que reste-t-il faire ? D'une part pousser ses extr mit s les plus affolantes l'exp rience de la violence - ce qui a donn la derni re p riode de l'oeuvre selon les terminologies habituelles, longtemps la moins admise et la plus redout e. Et d'autre part d montrer par la reprise et la mise nu de leurs toiles que les grands pr d cesseurs de Picasso avaient donn de l'humanit des repr sentations qu'il suffit de durcir pour y reconna tre les sc nes d'Eros et de Thanatos, les Femmes d'Alger et le Massacre des Innocents, le D jeuner sur l'herbe et L'enl vement des Sabines. Dans un monde occidental qui se glorifie de ses nouveaut s et de sa prosp rit , le vieux Picasso rappelle inlassablement - et non sans une cruaut d sabus e- que l'histoire est vou e finir par des d sastres - y compris l'histoire de l'art du reste.
